"J'admets que le Camp est terriblement difficile à définir. Il faut le méditer et le ressentir intuitivement, comme le Tao de Lao-Tseu. Quand vous y serez parvenu, vous aurez envie d'employer ce mot chaque fois que vous discuterez d'esthétique ou de philosophie, ou de presque tout. Je n'arrive pas à comprendre comment les critiques réussissent à s'en passer."


Christopher ISHERWOOD, The World in the Evening

"Le Camp, c'est la pose effrénée, l'affectation érigée en système, la dérision par l'outrance, l'exhibitionnisme exacerbé, la primauté du second degré, la sublimation par le grotesque, le kitsch dépassant le domaine esthétique pour intégrer la sphère comportementale."

Peter FRENCH, Beauty is the Beast



vendredi 31 octobre 2014

ORGIE MACABRE (Orgy of the dead, 1966)

Spécial Halloween/ La musique adoucit les mœurs # 11

Par Valentine Deluxe


Aujourd’hui, pas de blablas, pas de phrase inutile, tarabiscotée, longue comme un film de Chantal Ackerman écrit par Marguerite Duras -- remarquez, l'inverse serait encore plus effroyable, et surtout... beaucoup plus long !!!
Aujourd’hui je la boucle ; aujourd’hui, je me tais! (... ou peu s'en faut...)
Ça n'est pas que je vous fasse la gueule, que je sois aphone (et à flore), en grève, ou en panne d'encrier... non !
C'est juste que ce que la merveille je dois vous présenter aujourd’hui - Halloween oblige ! - se suffit à elle même.
Je dirai même plus : il n'y a pas de mot assez fort pour la décrire!


Déjà, un film qui s'annonce fièrement en "gorgeous Astra-vision" et "shocking sexy-color", moi je dis: 
Total respect!

Pour son exploitation  française (car ce film fut bel et bien distribué en salle, autre exploit !), l'intrigue, aussi brumeuse que l'unique et minable cimetière qui sert de décor au métrage, était sommairement  résumée par cet encart aguicheur :

"Les rites surnaturels de belles créatures condamnées pour leur immoralité et leurs péchés sur terre !"

Waowwww! 
(ça c'est pas sur les affiches, c'est moi )

Elle a un regard d'un pétillant, la "belle créature condamnée", 
c'est un vrai bonheur !

Ce que l'affiche ne mentionne pas, c'est que les joyeuses gaudrioles macabres que l'on nous promet se déroulent devant un pubis... heu! pardon, un public (c'est l'effet du sexy-color, ça !!!)  aussi restreint que bigarré!
A savoir :
  1. Un couple de jeunes mariés, dont la voiture - comme il se doit - vient de  tomber en panne dans les environs. 
  2. Une Morticia Addams de Prisunic (Fawn Silver) et un Dracula des plus maniérés (Criswell, le mage de l'écurie Ed Wood).
  3. Un loup-garou pelucheux et une momie anémique, improbables sidekicks commentant à tour de rôle,  de façon spirituelle (oui, enfin...) et avec une régularité de coucou suisse, l'improbable et sulfureux spectacle.
 Criswell, c'est madame Soleil
 ... en moins viril.
    Mais en quoi  consistent donc ces fameux rites surnaturels de belles créatures condamnées pour leur immoralité ?
    Eh bien, allons voir ça tout de suite avec mademoiselle Castagnettes qui nous présente sa fameuse danse spécial Toussaint, ou comme on dit dans la langue de Cervantès, El  dia del muertos ;  "a celebration in her contry" nous assure la pseudo Vampira, qui n'arrive pas à décider si la charmante donzelle est espagnole ou mexicaine.
     ... mais on ne va pas faire des mouches à 4 queues pour si peu!


                 

    Bon,  le vieux est content en tout cas, c'est déjà ça!
    Alors vous vous demanderez peut être : "Mais à part ça, qu'est ce qui se passe ?"
    Ben rien ! Les numéros de strip-tease - tous plus gratinés les uns que les autres - s'enchaînent inlassablement, avec juste un costume et un "gimmick" différents à chaque fois, comme dans un cabaret pour VRP belges  du Pigalle de la grande époque, et quand après 90 (loooooongues) minutes le soleil se lève enfin sur cette nuit d'horreur, non seulement vos zygomatiques endoloris sont au bord de la crise de tétanie, mais Criswell et ses comparses se sont transformés en squelettes, ne laissant que notre brave couple de jouvenceaux témoin de cette nuit de Walpurgis au concert Mayol
    Vous ne me croyez pas?... Vous ne me croyez pas ?!?
    Eh ben tiens, pour les plus téméraires et résistants d'entre vous, vous pourrez vérifier, je vous refile l'intégrale !!!
    Non, ne me remerciez pas, puisque je vous dis que ça me fait plaisir (... et éteignez bien tout en partant).




    WARLORDS OF ATLANTIS (les 7 cités d'Atlantis, 1978)

    BOOKING.CAMP #1

    par Valentine Deluxe



    Ne vous laissez pas avoir par cette météo trompeuse et ce faux air d'été indien.
    Les faits sont là, les statistiques imparables.
    En novembre :

    • Les cimetières fleurissent 
    • Les jours raccourcissent
    • Les températures baissent
    • Les dépressions augmentent
    C'est scientifique, y a pas à revenir là-dessus. Et s’il n’y avait que la promesse - serinée par tous les JT de France, de Navarre et d'Outre-Quievrain - d'une redoutable  déferlante de nouveaux virus, aussi exotiques qu’un film de Maria Montez et plus foudroyant qu’un édito de Hedda Hopper, passe encore. 

     Le virus Ebola vu au microscope
    (photo non contractuelle)

    Mais il vous faudra aussi composer  - Rengrègement de mal ! Surcroît de désespoir ![1] - avec Halloween et ses cortèges de chiards peinturlurés, qui vous réclament à cor et à cri (qu’ils ont perçant, ces gueux) des doses de glucose qui décimeraient, par choc diabétique foudroyant, des régiments entiers de soudards polonais.


     « The horror ! The horror ! »

    Vous croyez en avoir fini ? C’eut été trop beau, car à peine les singeries païennes de l’oncle Sam terminées, voici qu'arrivent les baraquements calibrés des villages de Noël, et leurs vapeurs écœurantes de tartiflettes surgelées et de vin chaud,  mi-cannelle/ mi-antigel...
    Non, vraiment, je ne sais pas vous, mais moi, le dernier trimestre, ce n’est pas ma saison préférée !
    ... Quoi de plus flippant ???

    Heureusement en toute circonstance - surtout les plus désespérées - vous pouvez toujours compter sur votre blog préféré pour mettre un coup de soleil dans l'eau froide !
    Alors moi, Valentine Deluxe - Votre Valentine -, je vous dis :

    ... et si on parlait plutôt de nos prochaines vacances?

    La voilà, l'antidote miracle à la grisaille saisonnière! C'est donc le moment idoine pour lancer une nouvelle rubrique, placée sous le signes du voyage-voyage ("... sur l'eau sacrée d'un fleuve indiennnn !")
      

    En 4 ans d'existence, nous n'avions jamais évoqué Desirless.
    (ouf ! voilà, c'est fait !) 
     
    Mais comme il vaut mieux ne pas acheter un chat dans un sac -- car s'il est vivant, ça remue et ça griffe, et si il est mort, ça va sentir mauvais --, nous allons patiemment essayer de vous trouver la pépite, le diamant, le trèfle à quatre feuilles de la villégiature!
    Et oui, vous ne pensiez quand même pas que j'allais vous envoyer vous dorer la pilule dans la case de l'oncle Tom, dans de la paillote "Trigano" avec buffet "Tricatel" ! 

     



    Grâce à "BOOKING.CAMP" vous allez pouvoir non seulement trouver LA destination, mais aussi réserver en ligne et comparer les avis des voyageurs ; elle est pas belle la vie?
    Et il y a encore des mauvaises langues après ça qui diront que nous sommes passéistes, ici
    Sus aux perfides, vive le progrès et l'aventure moderne !


    Alors pour notre première destination, je vous propose d'aller faire un tour à Thinqua, une des 7 cités d'Atlantis, tirée du film ... "Les 7 cités d'Atlantis" (comme ça au moins, c'est pratique, on risque pas de se méprendre...)
    Déjà à Thinka, avant toute chose, il y a l'accueil ! 
    Le Grand Inquisiteur en personne vient vous prendre par la main pour faire le tour des installations, en vous brossant bien dans le sens du poil et en vous assurant que "vous êtes un être supérieur !"... rien que ça!
    N'allez surtout pas vous laisser refroidir par cet  appellation un tantinet austère de "Grand Inquisiteur", non, car ce label quelque peu rugueux désigne en fait la public-relation de l'hôtel :
    Les jambes de Cyd Charisse (et le reste aussi), maquillage pour drag-queen épileptique, coiffée par un as du bigoudi visiblement sous influence de LSD - ou pire! - et habillée avec des surplus de chez Ado (vous vous rappelez, "les rideaux à lisière d'or !")... la grande classe quoi!

    Le Grand Inquisiteur : 
    Julie Mc Cow avec les cannes de Cyd Charisse

    Mais taisons-nous (faut toujours que je cause trop moi, désolée !) et partons plutôt faire le tour de la bicoque.


    ...Oui, c'est vraiment parfait, il n'y a rien à ajouter!
    Et encore, je ne vous ai pas montré l'espace "détente et relaxation", une merveille !



    "Grand dieu, mais ils flottent!"... c'est ti pas beau ça, comme dialogue?
    Et le hall de la contemplation, on dira ce qu'on voudra, ça a quand même une autre gueule que les ateliers "macramé et collier de nouilles" du Club Med'!
    Bon, et maintenant, si vous vous demandez comment la môme Charisse s'est fait faire ses adorables frisotis, passons par le salon de coiffure, où évidemment, on n'utilise qu'un matériel de pointe!
    Et en plus, leur casque pour les mises-en-plis et permanentes, il est branché sur Canal sat', ce qui est quand même super pour patienter pendant qu'on vous fait vos crolles ! [2]





    Bon, évidemment comme vous pouvez le constater, il y a toujours de "bons amis" pour venir gâcher l'ambiance parce que vous avez une chambre avec vue (enfin, je ne sais pas si la chambre est avec vue, mais le casque oui en tout cas !)

    ... Ah ! j'allais vous quitter en oubliant le principal : c'est "Ultra All Inclusive" en plus !!! 
    C'est pas merveilleux ça?  Alors, n'attendez plus pour réserver!
    Merci qui ? 

    MERCI BOOKING.CAMP!





    [1] "L’Avare", acte V, scène IV (… ça vous la coupe ça, non ?)


    [2] Crolle :

    [krol] n.f.

    Belgicisme, du flamand : krul, "boucle".

    Boucle de cheveux

    mercredi 8 octobre 2014

    MORT UN DIMANCHE DE PLUIE (1986)

    French Camp #7 :

    "Une nounou d'enfer !"

    Par Valentine Deluxe



    Il est des films qui naissent dans la discrétion, sortent dans l’indifférence, et disparaissent dans l’anonymat.
    Celui que je vous propose d'explorer aujourd’hui est de ceux-là.
    Si "Mort un dimanche de pluie" n’évoque aujourd’hui plus grand-chose à personne (ce qui ne fait pas bien lourd), rassurez-vous, déjà à l'époque de sa sortie, il n'en disait pas davantage.
    Avec un box-office parisien d'à peu près 10.000 péquenauds, et pas beaucoup plus au compteur national, c'est peu dire qu'il n'a pas rempli tous les espoirs de ses créateurs (et à plus forte raison, ceux de ses bailleurs de fonds !)

    Ils ont réussi à vendre encore moins de disques
    que de tickets de cinéma : un exploit !

    Heureusement, pour son grand retour après une interminable période d'aphasie (que d'aucuns appelleront "flemmardise chronique" -- et d'aucuns auront raison), votre Valentine chérie, tel Zorro venant au secours d'un pauvre Calimero agonisant dans l’indifférence la plus crasse, arrive, flamboyante et généreuse, pour tirer de l'oubli cette trop rare pépite.
    (Et vous noterez au passage qu’après ces  mois d'absence, je ne sais toujours pas faire des phrases de moins de 5 lignes !)

     Un flop d'une injustice criante!

    Je vais vous présenter ici une espèce bien peu commune dans le paysage cinématographique français d’hier et d’aujourd’hui : le thriller pour harpie ménopausée.
    Ce cas de figure a connu des heures plus que glorieuses dans les studios hollywoodiens après le triomphe de « Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? », film-matrice décliné sous bien des formes, avec toujours comme point commun des titres à rallonge où figure presque invariablement un prénom féminin, de Tante Roo à Tante Alice, en passant par Charlotte, Helen ou Delilah… j’en passe et des plus flétries.

     Le mythe fondateur (mais je ne vous apprends rien...)

    Par contre, dans la patrie de Descartes et Molière, l’espèce est plus rare qu’un ragoût de Dodo à la carte d’un McDonald (oui, c'est un peu tiré par les cheveux comme métaphore, j’en conviens...)
    Ô bien sûr, grâce à un riche patrimoine littéraire, la mégère défraîchie, de Mme Thénardier à Folcoche, n’est pas complètement absente des écrans, mais rarement dans le cadre du frissonneur (traduction toute personnelle de « thriller », car nous avons des cotas à respecter ici).
    Alors, vous pensez bien si le film que je veux vous présenter aujourd’hui a des allures de diamant noir, voire d’oasis miraculeuse !

    Une référence en  harpie ménopausée "made in France":
    Madame Thénardier.

    Car niveau vilaine, notre héroïne du jour fait fort. TRÈS fort !
    Visez plutôt le tableau de chasse :
    En 90 minutes, en plus des sévices divers infligés sur la personne d’une pauvre petiote d’à peine 8 ans -- battue, affamée, bourrée de tranquillisants, voire ligotée  toute nue sur la lunette des WC! --, la vilaine gueuse dézingue quand même...
    ***attention pour le spoiler, vous êtes prévenus***
    ... une baby-sitter,  un père de famille, et… non pas un, mais DEUX adorables petits chats !!!
    Comme palmarès, ça se pose là !
    Z’avouerez quand même qu’elle met la barre bien haut question vilenie, on est carrément dans un niveau rien moins qu’olympique, là !

     Pas vraiment une tête de psychopathe sanguinaire, hein ?
    ... encore que !

    Coup de génie au niveau du casting, cette tendre créature est incarnée par la toujours géniale Dominique Lavanant, contre-emploi des plus audacieux pour l’ex-transfuge du Splendid,  peu habituée à incarner ainsi les gorgones hystériques.
    Parfaite de bout en bout et divinement haïssable ; c’est peu dire, au vu de sa fabuleuse prestation, que nous regrettons avec des ongles de fer [1] la frilosité des réalisateurs à la faire sortir des sentiers rassurants et balisés de la comédie franchouillarde.

    Fini les p'tits sucs des Vosges :
    elle suce plus, elle flingue !

    Alors maintenant, je vais la boucler un peu et vous proposer d’aller jeter un petit coup d’œil sur les méthodes pédagogiques quelques peu surprenantes de notre Hitler en jupon.



    On est quand même plus près de la veuve Mao que de Françoise Dolto, vous en conviendrez !
    Et elle n'a même pas besoin de faire preuve de violence physique pour faire flipper les pisseuses...
    (et au passage vous allez pouvoir profiter d'un petit extrait de l'immortel "I'm walking away", du non moins inoubliable Marshall Titus! )



    Une vraie teigne, hein?
    Si je puis me permettre, je vous déconseille vivement de mettre en pratique chez vous ce modèle éducationnel, quels que soient les méfaits commis par vos adorables têtes blondes.
    Moi de toute façon, si on me demande, je nierai tout en bloc : je ne vous connais pas, je ne vous ai rien dit, on ne s’est jamais vu !… et si ça sort d'ici, je sais que c'est vous, capito ?

    Sur ce, je vous embrasse bien fort et -- promis, juré, craché !-- je ne mettrai plus 6 mois pour vous pondre ma prochaine babillarde !


    [1] Traduction littérale d’une savoureuse expression wallonne : « Rigrèter avou dès ongues di fier ».