"J'admets que le Camp est terriblement difficile à définir. Il faut le méditer et le ressentir intuitivement, comme le Tao de Lao-Tseu. Quand vous y serez parvenu, vous aurez envie d'employer ce mot chaque fois que vous discuterez d'esthétique ou de philosophie, ou de presque tout. Je n'arrive pas à comprendre comment les critiques réussissent à s'en passer."


Christopher ISHERWOOD, The World in the Evening

"Le Camp, c'est la pose effrénée, l'affectation érigée en système, la dérision par l'outrance, l'exhibitionnisme exacerbé, la primauté du second degré, la sublimation par le grotesque, le kitsch dépassant le domaine esthétique pour intégrer la sphère comportementale."

Peter FRENCH, Beauty is the Beast



mercredi 1 septembre 2010

OUR MISS FRED ou LA FOLLE VADROUILLE


BB'S MOVIES #5

par BBJane Hudson

On dit toujours : « La Seconde Guerre Mondiale »...
Moi, je veux bien, mais il serait bon de rappeler que le terme « seconde » s'emploie lorsqu'il est établi que rien ne viendra à la suite, autrement dit qu'il n'y aura pas de « troisième ». Sinon, c'est « deuxième » qu'il faut dire. Pour ce qui est d'une Guerre Mondiale, je ne parierai pas mon Tampax qu'on est à l'abri d'une nouvelle d'ici la Fin du Monde (qu'on n'appellera pas « La Première », vu qu'elle promet d'être la seule – ce qui, vous l'admettrez, est d'un grand réconfort...)





Ceci pour en venir à notre film du jour, Our Miss Fred (titre français : néant, vu que la bande n'est pas sortie en nos contrées), qui se déroule précisément durant la Deuxième Guerre Mondiale, et plus exactement lors de l'envahissement de notre beau pays par les hordes teutonnes. Ce jour-là, Fred Wimbush, acteur shakespearien effectuant son service dans le Nord de la France, est surpris par l'invasion chleuse alors qu'il interprète un rôle de femme dans un spectacle monté par ses camarades biffins. Les boches -- qui, on le sait, ne sont pas très malins (même qu'on se demande comment ils firent pour nous occuper si longtemps) -- le prennent pour une véritable lady, et poussent l'inclairvoyance jusqu'à le lutiner un brin. Craignant de passer pour un espion, Fred préfère ne pas les détromper. En même temps, peu soucieux de se faire fridoliner la rosette par nos nazillons en goguette, il décide de regagner dare-dare son île natale en compagnie d'une escouade d'écolières british qu'étaient venues faire du tourisme par chez nous. S'ensuit une Grande Vadrouille mâtinée de La Cage aux folles, alertement troussée par Bob KELLETT, et dominée par la flamboyante personnalité de sa star : Danny LA RUE (décédé l'an dernier, à ma grande consternation, même que mon rimmel n'a pas encore séché).





En Angleterre, LA RUE était une véritable institution : le premier travesti nommé Officier de l'Empire Britannique. Bob HOPE voyait en lui "la femme la plus glamour du Monde", et la grande Noël COWARD le décrivit un jour comme "l'homme le plus professionnel, le plus spirituel, et le plus charmant du métier". Curieusement, Our Miss Fred est le seul film où il tint la vedette, ce qu'on peut déplorer au vu de son talent folle. En France, où, à part Benny HILL et Mister Bean (ajoutons les Monty Python pour faire bonne mesure), les amuseurs anglais n'ont jamais eu la cote, il reste aussi glorieusement inconnu que le soldat du même nom, et que ces autres spécialistes de l'humour rosbif que sont Spike MILLIGAN ou Harry SECOMBE.







La scène qui suit explique peut-être pourquoi Our Miss Fred n'eut jamais l'honneur d'une exploitation hexagonale : nos braves compatriotes y apparaissent comme de foutus péquenots, durs de la comprenette et agités du calcif. C'est comme ça tout au long du film, qui nous offre un portrait assez peu reluisant, pour ne pas dire férocement diffamatoire, du peuple de la Liberté, du baiser fourré, des cuisses de grenouilles, et de Nicolène SARKOYALE (ou de Ségolas ROYZY, si vous préférez...)
Notre Miss Fred croise ici le chemin de deux ruraux à qui elle tente de faire comprendre qu'elle n'est point celle dont elle a l'air, dans l'espoir qu'ils sauront lui fournir des fringues mieux adaptées à son périple en rase cambrousse. Notez l'impayable accent français des acteurs britanniques jouant nos braves paysans. Notez l'étonnante ressemblance du pays ch'ti avec la verdoyante Albion. Notez les tragiques méprises auxquelles nous expose la barrière du langage lorsqu'on ne la sait point enjamber. Notez tout ce que vous voudrez, mais ne manquez pas cet extrait...
God save the drag queen !...




2 commentaires:

  1. Il ne reste donc plus que Lily Savage, pratiquement disparue... Sale temps pour les Anglais, nous ne savions pas pour Miss LaRue. Snif.

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  2. ...bon, quel producteur audacieux va se décider à tailler un piédestal cinématographique à Valentine avant qu'elle aussi ne bouffe la grenouille, dépêchez vous messieurs, "tic-tac tic-tac" fait mon horloge interne!
    ah! idée!:
    ...un remake de la 7ém compagnie recentré sur une Mata-Hari de bordel militaire qui aurait une liaison avec un oberstumpfuhrer pour faire évader son jeune amant résistant (...oui enfin, je veux dire, qui est dans la résistance)! ...à la fin, tondue et sur le peloton d'exécution, elle est sauvée in-extremis par le jeune bellâtre qui défonce le mur de la sous-préfecture, à cheval sur un char américain!!! ...mais quand il la détache, ils ont à peine le temps d'échanger un langoureux baiser qu'une balle tirée par l'aberstrum-truc, à moitié écrabouillé sous les chenilles du tank, vient séparer à jamais les amants! ...elle trouve juste l'énergie d'entonner "la madelon" repris en cœur par tous le régiment de libérateur et de s'écrouler dans les bras du jeune maquisard en pleur!

    ...bon début, mais comment développer?

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