"J'admets que le Camp est terriblement difficile à définir. Il faut le méditer et le ressentir intuitivement, comme le Tao de Lao-Tseu. Quand vous y serez parvenu, vous aurez envie d'employer ce mot chaque fois que vous discuterez d'esthétique ou de philosophie, ou de presque tout. Je n'arrive pas à comprendre comment les critiques réussissent à s'en passer."


Christopher ISHERWOOD, The World in the Evening

"Le Camp, c'est la pose effrénée, l'affectation érigée en système, la dérision par l'outrance, l'exhibitionnisme exacerbé, la primauté du second degré, la sublimation par le grotesque, le kitsch dépassant le domaine esthétique pour intégrer la sphère comportementale."

Peter FRENCH, Beauty is the Beast



jeudi 14 octobre 2010

COMMENT S'ENVOYER DES NOMS D'OISEAUX AVEC PANACHE


LES BONS CONSEILS DE VALENTINE # 11

par Valentine Deluxe


Lorsque j'évoque pour vous le monde harmonieux où batifole la Grande Dame Homologuée, et dans lequel les aléas et pépins qu’affronte le commun des mortels (celui qui stagne au bas de l’échelle du glamour) ont autant de prise sur elle qu’une chiure de papillon sur un jupon d’organdi, mes remarques appellent néanmoins une sévère réserve.
Car tel l’éléphant d’Afrique, dont le tonnage équivaut à l’ego d’une Grande Dame d’âge moyen, celle-ci ne peut en effet s’ébattre que sur un territoire en adéquation avec l’amplitude de sa mégalomanie galopante.


Une Grande Dame Homologuée en période "fort tonnage de l'ego".

Question « public », ça n’est jamais un problème : cabotine comme pas deux, plus il abonde, mieux elle se porte, toute épanouie et resplendissante devant ce parterre médusé par tant d’allant et de charisme.
Mais encore faut-il qu’elle soit la seule de sa catégorie à baguenauder dans les verts pâturages de la grandiloquence panachée (« vert émeraude », les arpents, cela va sans dire !)
Qu’une autre grande dame entre dans l’arène et c’est le clash, le combat singulier et sanglant à qui aura le dernier mot. Un peu comme des négociations entre pré-formateurs de gouvernement dans un certain petit royaume tout plat, avec des cathédrales pour uniques montagnes, et dont je n’oserais prononcer le nom de peur de n’être plus en phase avec l’actualité politico-communautaire de ces dernières heures. Mais de panache, hélas, il n’est point question avec ces animaux-là.
Car s’il est deux conditions sine qua non pour vous crêper le chignon (avec panache) – et Dieu sait que cela manque cruellement au monde politique –, ce sont bien la variété de votre vocabulaire (acerbe et tout confit d’arsenic), et la rapidité fulgurante de vos reparties !





Prêts pour la démonstration ?
J’appelle maintenant à la barre Kim NOVAK et Elizabeth TAYLOR, dans une des scènes les plus jouissives (et inénarrablement Camp, cela va sans dire) du Miroir se brisa.
Réalisé de la façon la plus plate par un Guy HAMILTON aux abonnés absents, il nous permet de retrouver nos deux donzelles en pleine phase terminale de hasbeenization, juste avant qu’elles s’en aillent cachetonner dans quelques soap-operas du petit écran.
Kim a le visage retendu comme une peau de tambour ; si d’aventure elle avait la malencontreuse idée de forcer son sourire, les coutures lâcheraient et les oreilles fuseraient à la vitesse d’un spoutnik, risquant de faire trois morts dans l’assistance.
Mlle TAYLOR-WARNER, elle – déjà ex-Mme BURTON(2 fois) / FISHER / WILDING / HILTON et veuve TODD – transite alors entre deux allées et venues au Betty Ford Center, où elle garde une suite à l’année et où l’on a le bon goût d’harmoniser la couleur des rideaux avec celle des sangles du lit.
Les emmerdements ne venant jamais seuls, elle est aussi en pleine période de boulimie galopante (due à ses incessants déplacements pour suivre son sénateur de mari en campagne présidentielle) et à deux doigts de l’effet « pop-corn » .
L’effet pop-corn ?!?… Mais oui, vous savez bien, c’est quand les bourrelets adipeux commencent à déborder de la gaine de façon incontrôlable, comme un Blob en phase « conquête du monde » !


Un bourrelet adipeux de Liz TAYLOR, en phase "conquête du monde".

Pour faire bonne mesure, les deux drôlesses sont également maltraitées par une costume designer visiblement sous assuétude éthylique (pauvre Phyllis DALTON, pourtant lauréate d’un petit chauve en or pour les costumes de Doctor Zhivago), transformant la première en œuf de Pâques et affublant l’autre d’une potée de myosotis en guise de couvre-chef.
Heureusement pour elles, le panache est donc aussi une affaire de langage... et le leur est aussi fleuri que le bibi de Liz :




1 commentaire:

  1. Un plaisir de revoir cette brochette d'acteurs ; c'est vrai qu'à l'époque les dialogues pouvaient être dévastateurs mais sans une once de vulgarité. La grande classe.

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