"J'admets que le Camp est terriblement difficile à définir. Il faut le méditer et le ressentir intuitivement, comme le Tao de Lao-Tseu. Quand vous y serez parvenu, vous aurez envie d'employer ce mot chaque fois que vous discuterez d'esthétique ou de philosophie, ou de presque tout. Je n'arrive pas à comprendre comment les critiques réussissent à s'en passer."


Christopher ISHERWOOD, The World in the Evening

"Le Camp, c'est la pose effrénée, l'affectation érigée en système, la dérision par l'outrance, l'exhibitionnisme exacerbé, la primauté du second degré, la sublimation par le grotesque, le kitsch dépassant le domaine esthétique pour intégrer la sphère comportementale."

Peter FRENCH, Beauty is the Beast



mercredi 8 octobre 2014

MORT UN DIMANCHE DE PLUIE (1986)

French Camp #7 :

"Une nounou d'enfer !"

Par Valentine Deluxe



Il est des films qui naissent dans la discrétion, sortent dans l’indifférence, et disparaissent dans l’anonymat.
Celui que je vous propose d'explorer aujourd’hui est de ceux-là.
Si "Mort un dimanche de pluie" n’évoque aujourd’hui plus grand-chose à personne (ce qui ne fait pas bien lourd), rassurez-vous, déjà à l'époque de sa sortie, il n'en disait pas davantage.
Avec un box-office parisien d'à peu près 10.000 péquenauds, et pas beaucoup plus au compteur national, c'est peu dire qu'il n'a pas rempli tous les espoirs de ses créateurs (et à plus forte raison, ceux de ses bailleurs de fonds !)

Ils ont réussi à vendre encore moins de disques
que de tickets de cinéma : un exploit !

Heureusement, pour son grand retour après une interminable période d'aphasie (que d'aucuns appelleront "flemmardise chronique" -- et d'aucuns auront raison), votre Valentine chérie, tel Zorro venant au secours d'un pauvre Calimero agonisant dans l’indifférence la plus crasse, arrive, flamboyante et généreuse, pour tirer de l'oubli cette trop rare pépite.
(Et vous noterez au passage qu’après ces  mois d'absence, je ne sais toujours pas faire des phrases de moins de 5 lignes !)

 Un flop d'une injustice criante!

Je vais vous présenter ici une espèce bien peu commune dans le paysage cinématographique français d’hier et d’aujourd’hui : le thriller pour harpie ménopausée.
Ce cas de figure a connu des heures plus que glorieuses dans les studios hollywoodiens après le triomphe de « Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? », film-matrice décliné sous bien des formes, avec toujours comme point commun des titres à rallonge où figure presque invariablement un prénom féminin, de Tante Roo à Tante Alice, en passant par Charlotte, Helen ou Delilah… j’en passe et des plus flétries.

 Le mythe fondateur (mais je ne vous apprends rien...)

Par contre, dans la patrie de Descartes et Molière, l’espèce est plus rare qu’un ragoût de Dodo à la carte d’un McDonald (oui, c'est un peu tiré par les cheveux comme métaphore, j’en conviens...)
Ô bien sûr, grâce à un riche patrimoine littéraire, la mégère défraîchie, de Mme Thénardier à Folcoche, n’est pas complètement absente des écrans, mais rarement dans le cadre du frissonneur (traduction toute personnelle de « thriller », car nous avons des cotas à respecter ici).
Alors, vous pensez bien si le film que je veux vous présenter aujourd’hui a des allures de diamant noir, voire d’oasis miraculeuse !

Une référence en  harpie ménopausée "made in France":
Madame Thénardier.

Car niveau vilaine, notre héroïne du jour fait fort. TRÈS fort !
Visez plutôt le tableau de chasse :
En 90 minutes, en plus des sévices divers infligés sur la personne d’une pauvre petiote d’à peine 8 ans -- battue, affamée, bourrée de tranquillisants, voire ligotée  toute nue sur la lunette des WC! --, la vilaine gueuse dézingue quand même...
***attention pour le spoiler, vous êtes prévenus***
... une baby-sitter,  un père de famille, et… non pas un, mais DEUX adorables petits chats !!!
Comme palmarès, ça se pose là !
Z’avouerez quand même qu’elle met la barre bien haut question vilenie, on est carrément dans un niveau rien moins qu’olympique, là !

 Pas vraiment une tête de psychopathe sanguinaire, hein ?
... encore que !

Coup de génie au niveau du casting, cette tendre créature est incarnée par la toujours géniale Dominique Lavanant, contre-emploi des plus audacieux pour l’ex-transfuge du Splendid,  peu habituée à incarner ainsi les gorgones hystériques.
Parfaite de bout en bout et divinement haïssable ; c’est peu dire, au vu de sa fabuleuse prestation, que nous regrettons avec des ongles de fer [1] la frilosité des réalisateurs à la faire sortir des sentiers rassurants et balisés de la comédie franchouillarde.

Fini les p'tits sucs des Vosges :
elle suce plus, elle flingue !

Alors maintenant, je vais la boucler un peu et vous proposer d’aller jeter un petit coup d’œil sur les méthodes pédagogiques quelques peu surprenantes de notre Hitler en jupon.



On est quand même plus près de la veuve Mao que de Françoise Dolto, vous en conviendrez !
Et elle n'a même pas besoin de faire preuve de violence physique pour faire flipper les pisseuses...
(et au passage vous allez pouvoir profiter d'un petit extrait de l'immortel "I'm walking away", du non moins inoubliable Marshall Titus! )



Une vraie teigne, hein?
Si je puis me permettre, je vous déconseille vivement de mettre en pratique chez vous ce modèle éducationnel, quels que soient les méfaits commis par vos adorables têtes blondes.
Moi de toute façon, si on me demande, je nierai tout en bloc : je ne vous connais pas, je ne vous ai rien dit, on ne s’est jamais vu !… et si ça sort d'ici, je sais que c'est vous, capito ?

Sur ce, je vous embrasse bien fort et -- promis, juré, craché !-- je ne mettrai plus 6 mois pour vous pondre ma prochaine babillarde !


[1] Traduction littérale d’une savoureuse expression wallonne : « Rigrèter avou dès ongues di fier ».

2 commentaires:

  1. Elle est tout de même très maladroite la gamine, je comprends que Melle Bromsky, Madame Bromsky, qui s'occupe avec abnégation de son mari malade, perde patience et lui colle un pain.
    Il y a 2 jours je découvre ce blog, depuis on vous lit on vous savoure, on parle de vous, on est totalement enthousiaste (sauf pour la cadence de parution des babillardes), on vous aime quoi. Et on fiche plus rien au bureau.
    C'est bien, j'ai 4 ans à rattraper ce qui vous laisse largement le temps d'éditer un nouveau billet,le dernier datant de la fête des mères!

    BeBaum

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  2. Cher-e BeBaum,
    voilà un merveilleux msg qui va nous mettre fissa le p'tit coup de pied au fesse nécessaire pour nous remettre au clavier! promis/juré, y'a de la nouveauté en route! ...Et sans la cautionner publiquement, nous ne pouvons pas non plus être trop sévère avec Mme Bromsky, cette gamine est en fait particulièrement crispante

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