"J'admets que le Camp est terriblement difficile à définir. Il faut le méditer et le ressentir intuitivement, comme le Tao de Lao-Tseu. Quand vous y serez parvenu, vous aurez envie d'employer ce mot chaque fois que vous discuterez d'esthétique ou de philosophie, ou de presque tout. Je n'arrive pas à comprendre comment les critiques réussissent à s'en passer."


Christopher ISHERWOOD, The World in the Evening

"Le Camp, c'est la pose effrénée, l'affectation érigée en système, la dérision par l'outrance, l'exhibitionnisme exacerbé, la primauté du second degré, la sublimation par le grotesque, le kitsch dépassant le domaine esthétique pour intégrer la sphère comportementale."

Peter FRENCH, Beauty is the Beast



jeudi 13 mai 2010

LA MUSIQUE ADOUCIT LES MOEURS (et délie les langues...)

par Valentine Deluxe

Pour continuer notre petite exploration musicale, et avant de partir pour des contrées plus exotiques, revenons sur le territoire bien balisé du "film-catastrophe" tel qu’il se concevait dans les années 70.
Les tenants du bon goût et de la mesure auront vite fait de détourner le regard en se pinçant le nez devant la liste des œuvres incriminées ; mais une chose est certaine : pour de nostalgiques raisons qu’il n’est plus besoin de vous rappeler ici (cf. La musique adoucit les mœurs #1), vous n’arriverez jamais, même sous les tortures les plus raffinées, les sévices les plus dégradants (ben quoi, on peut rêver non ?) à me faire avouer que Tremblement de terre, Le Pont de Cassandra ou Meteor sont des grands crus classés du nanar à gros budget.
Lancé par le carton incroyable en 1972 de L’Aventure du Poséidon, la formule - pour faire bref, c’est Grand Hotel avec un désastre d’ampleur biblique au milieu ou à la fin - sera décalquée jusqu'à l’usure complète de la trame, pour terminer minablement au crépuscule de la décennie avec une série de flops retentissants qui sonneront pour un temps le glas du genre.





Et en parlant de figures imposées, une de mes préférées est bien la chansonnette incontournable, petite ballade sirupeuse que n’aurait pas reniée Johnny LOGAN à l’Eurovision, et qui vient ponctuer les cataclysmes de tout poil.
Encore qu’elle n’intervienne en fait à ma connaissance que dans 3 films de la flopée de désastres de tout calibre qui déferlèrent sur les écrans entre le premier choc pétrolier et l’arrivée de REAGAN à la Maison Blanche (y a-t-il là un lien de cause à effet ?), cette petite parenthèse musicale apportait toujours une note d’air frais avant le début des hostilités, et permettait parfois de ramener un Oscar à la maison comme pour le « Morning After » du Poséidon, ou celle que nous allons découvrir plus bas.
Explorons donc maintenant rien moins que le Ben-Hur du genre, le justement célèbre La Tour infernale !





Irwin ALLEN, déjà producteur et coréalisateur du Poséidon, reprend ici la même recette, en y ajoutant une emphase comme on n’en osait plus rêver depuis BARNUM et Cecil B. DeMILLE. Je vous cite en gros le précepte, et de mémoire : « De tout, beaucoup, deux fois… et avec de la sauce ! »
Voyons donc ce morceau typique :
On plante en musique un décor du dernier mauvais goût, et, comme à Medrano, on en profite pour envoyer une impressionnante brochette de stars faire un tour de piste avant de commencer le spectacle – et ce même si certaines, passablement faisandées, ont la fraîcheur des vieilles carnes qu’on remonte de la mine les jours de la Sainte-Barbe.
Pas un mot - et Dieu sait qu’ils peuvent jacter avant qu’on ne se décide à foutre le feu à la baraque ! -, pas une intonation, pas un nœud pap’ qui ne soient « Over Ze Top »!
Alors comment faire pour ne pas adorer, pouvez-vous me le dire ?
Mais chhhhhut ! taisons-nous, ça commence :





Ah ! le nœud papillon de Richard CHAMBERLAIN ! …Vous avez maté le nœud papillon de Richard CHAMBERLAIN ?… Je pourrais faire du deltaplane avec un machin comme ça !
Et l’on ne parlera même pas de son smoking au joli camaïeu brun et beige...
Par contre, je ne saurais vous quitter sans souligner malicieusement au passage que, malgré un budget des plus confortables, perdues dans les plantes vertes, les tulipes en plastique et la foule des figurants fringués comme s'ils allaient au mariage de la tante Adèle, on peut reconnaître la fontaine et les vasques recyclées du restaurant où la STREISAND est venue quelques années plus tôt nous beugler « HELLO DOLLY ! » dans… heu ?… ben dans Hello Dolly !...
Sans doute l’art d’accommoder les restes ?

8 commentaires:

  1. ...J'ai lu récemment que LE PONT DE CASSANDRA contenait aussi une séquence musicale gratinée comme on les aime, mais malheureusement absente de toute les versions que j'ai pu visionner jusqu'ici. ...Si jamais quelqu'un met la main dessus, vous savez qui prévenir en priorité, hein mes trésors?

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  2. cet article est un régal ! A noter, pour la très petite histoire que "' the morning after ' a été chanté, entre autres, par ..Roy Orbison, le créateur de pretty woman ( l'unique, la chanson, n'allez pas me chercher le sirupeux richard gere);Johnny logan ( lol ) la première fois de mon enfance que j'ai entendu parler de l'Irlande, ce fut, hélas, par J.Logan...bon ne me fais pas une dernière frayeur : JUREZ-moi que Chamberlain n'a jamais chanté ! sinon, euh...j'attrape ( désolée pour l'image ) un noeud coulant

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  3. @ Natural Born Dreamer : Saisis ton nœud coulant. Chamberlain a chanté -- j'ai même le disque !... Après ce chant, il est allé se cacher pour mourir...

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  4. ...et en plus il a participé au naufrage de "BREAKFAST TIFFANY's" à Broadway, un de plus magnifique flop de toute l'histoire de la comédie musicale!

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  5. natural born dreamer14 mai 2010 à 08:55

    Caché pour mourir ? on eut aimé -lol- ! Mais ce drole d'oiseau, après avoir écourté la vie de barbara Stanwyck et fait tourner bourrique Jean Simmons dans la série TV où il portait soutane, est allé se cacher au fond de la mine, non pas de lewarde mais d'allan Quatermain...alors,euh...son tour de chant, aux abris je n'ose y penser...

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  6. Une simple requête : s'il était possible de ne pas dire de mal des Allan Quatermain... En tout cas pas des Mines du roi Salomon.

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  7. ...moi je ne dis jamais de mal de personne de toute façon, au pire, je persifle, mais guère plus ;-)

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  8. Un plaisir de revoir Faye au summum de sa beauté...

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